dimanche 31 mai 2015

Le Grésivaudan honore le Chevalier Bayard, enfant du pays devenu héros national

Le Grésivaudan honore le Chevalier Bayard, enfant du pays devenu héros national




 
C’est avec le printemps que vont s’ouvrir les festivités « Bayard 2015 » liées aux commémorations des 500 ans de la bataille de Marignan pendant laquelle Pierre Terrail, plus connu sous le nom du Chevalier Bayard, s’est particulièrement illustré. Une occasion pour les associations et communes du Grésivaudan de remettre à l’honneur le noble chevalier dont la carrière militaire exemplaire lui a valu dès sa mort en 1524 de devenir un homme de légende.

Un programme d’animations à l’échelle du Grésivaudan
Le Chevalier Bayard est né à Pontcharra vers 1476 dans le château familial qui domine encore la vallée aujourd’hui. L’association Les Amis de Bayard qui se mobilise pour approfondir et diffuser l’histoire du chevalier a souhaité s’associer au Musée d’Allevard pour organiser cette année une exposition commémorative. Ne pouvant disposer du château, c’est le musée qui organise du 16 mai au 16 octobre 2015 cette exposition intitulée « Le Chevalier Bayard (1476-1524), enfant du Grésivaudan et héros national ».  
Riche d’un important patrimoine bâti et de nombreuses associations culturelles très actives, les communes du Grésivaudan et de Belledonne ont été invitées à s’associer aux festivités « Bayard 2015 ». Un programme varié sur les thèmes de Bayard, de la chevalerie, du Moyen-Age et de la Renaissance à découvrir sur 23 sites. 
La Communauté de communes du Grésivaudan soutient activement l’exposition et les différentes manifestations notamment par une aide financière aux acteurs mobilisés. 

Une exposition 
Le Chevalier Bayard est probablement avec Du Guesclin et Jeanne d’Arc, l’un des personnages les plus mythiques de l’histoire de France. L’exposition temporaire du Musée d’Allevard souhaite contribuer à mieux faire connaitre le preux chevalier qui vit le jour à Pontcharra et mourut au combat en 1524 lors de la tentative de reconquête du Milanais par François Ier
L’exposition consacre un premier espace aux origines et à la formation du jeune Pierre Terrail dont la famille appartient à la petite noblesse locale. Issu d’une fratrie de huit enfants, il parvient à l’âge de 10 ans, par l’entremise de son oncle Laurent Alleman, à entrer comme page à la cour de Savoie pour s’initier au métier des armes. Ayant fait ses preuves en Savoie, il se met au service du roi de France à l’âge de 14 ans. Il combat successivement pour trois souverains français, Louis XII, Charles VIII et François Ier qui voulaient faire valoir leurs droits héréditaires d’abord sur le Royaume de Naples puis sur le duché de Milan. 
A partir de 1494 et pendant près de soixante-dix ans, l’Italie fut le théâtre de luttes dynastiques dans lesquelles les souverains français mirent toutes leurs forces. Un espace de l’exposition est dédié aux Guerres d’Italie qui permirent à Bayard de s’illustrer, tant pour sa bravoure que pour son sens de l’honneur, ce qui lui valut le qualificatif de chevalier « sans peur et sans reproche ».
La bataille de Marignan dont nous commémorons les 500 ans et qui sera largement évoquée au musée, fut une étape décisive dans la carrière du soldat. Suite à cette victoire, le roi François Ier aurait demandé à être fait chevalier de la main même de Bayard, ce qui eût pour conséquence la reconnaissance et l’ascension sociale du soldat.

L’exposition s’attachera à montrer également que notre héros a vécu une période de transition entre le Moyen-Age et la Renaissance, qui dans le domaine de la guerre s’apparente à une sorte de « révolution militaire ». Les stratégies nouvelles, la professionnalisation des armées mais aussi l’évolution de l’armement avec l’utilisation de la « poudre noire » modifient considérablement les combats. Signe révélateur de ces évolutions, c’est avec une des premières armes à feu portable, l’arquebuse, que le chevalier Bayard pourtant protégé par sa lourde armure, fut mortellement blessé en 1524…

La dimension mythique de Pierre Terrail, petit noble dauphinois devenu héros national, fait l’objet de la dernière salle de l’exposition. En effet, quelques années après sa mort, les prouesses du valeureux et magnanime chevalier furent largement diffusées grâce aux récits écrits par Symphorien Champier mais aussi par Jacques de Mailles, son loyal serviteur originaire de Morêtel-de-Mailles. Le mythique chevalier ne cessa à partir du XVIIe siècle et jusque dans les années 1950 d’être cité en exemple, souvent à des fins politiques et patriotiques. Par la suite, comme l’explique Cécile Bonnet dans son mémoire sur « l’utilisation politique d’une gloire française », le mythe qui s’essouffle laisse place à la recherche de vérité historique, mais n’empêche pas le héros natif du Grésivaudan de continuer à être porteur de valeurs universelles : courage, loyauté et générosité.

Exposition présentée du 16 mai au 16 octobre 2015
Au musée d’Allevard, tous les jours sauf dimanche et jours fériés de 14h15 à 18h. 
Livret d’exposition à paraître (48 pages – 7 euros)

Musée d'Allevard
Parc des Forges, 1, rue de La Libération 
Tél. : 04 76 45 16 40 


La GLOIRE: frégate cuirassée, une première mondiale en 1859

D. Voisenon - C. Bachelier - N. Macian - JP Macian
Le mois dernier, Noëlle Macian, Jean Pierre Macian, Dominique Voisenon et moi, tous les quatre membres de l'Association des Amis du Musée du Pays d'Allevard*, avons écrit un article publié dans l'Allevardin, le journal de la commune. Cet article évoque la construction de la frégate "la Gloire", premier navire cuirassé dont la moitié du blindage a été fabriqué aux forges d'Allevard*. Une façon pour nous de rendre un hommage posthume  à Eugène Charrière et à tous les employés des Hauts-Fourneaux et Forges d'Allevard: mineurs, lamineurs, perceurs, forgerons, dessinateurs, ingénieurs... qui ont participé à cette aventure.

Sans doute, un tel sujet aurait-il mérité plus de précisions techniques, de photos ou de schémas, tant ce projet était pour le moins révolutionnaire. Mais cela aurait nécessité des pages et des pages et dans un journal municipal, la place est comptée.

Ci-après l'article tel que publié dans l'Allevardin.* Avec quelques photos.

La GLOIRE:  frégate cuirassée, une première mondiale en 1859

cuirassé la Gloire  (Musée de la Marine à Paris )
maquette de la frégate au musée de la Marine à Paris
Eugène Charrière
Eugène Charrière





« Je n’avais d’autres buts que de mettre en relief les fers d’Allevard et de grandir leur réputation. » Eugène Charrière* (1805/1885)








La guerre de Crimée* (1853-1856) met en lumière la fragilité des navires traditionnels en bois. La Marine française avait amené sur place trois batteries flottantes qui avaient fait la preuve de leur efficacité face à l’artillerie russe grâce à leur cuirasse de fer. En 1857, une commission initia une réflexion sur la nécessaire évolution de la Marine de guerre. Il fallait concevoir puis construire un bâtiment rapide, puissant et… cuirassé.
 Ce sera donc une formidable machine de guerre flottante de 77 m de longueur pour un déplacement de 5700 tonnes. Et surtout, un blindage qui pourrait résister à l’artillerie moderne.
détail de la maquette où ont été calculés les différents calculs des plaques de blindage
détail de la maquette sur laquelle ont été calculés les différents calculs des plaques de blindage



Les 820 tonnes de cuirasse seraient réparties sur deux rangées de plaques de fer forgé : la rangée inférieure de 12 cm d’épaisseur sous la flottaison, la supérieure de 10 cm protégeant la batterie et le pont.

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JP. Macian et C. Bachelier devant la maquette de travail originale

Ce navire, dénommé frégate, est né de l’imagination de l’ingénieur du génie maritime Dupuy de Lôme* (1815 – 1885).
Par ses caractéristiques, la frégate La Gloire sera donc un navire révolutionnaire, fruit de deux progrès essentiels: les moteurs à vapeurs de plus en plus performants et les avancées de la métallurgie.
 Le pays d’Allevard* disposait d’une longue histoire minière et métallurgique, remontant au moyen âge. En 1842, la société en commandite « Eugène Charrière et Cie » devient l’héritière de cette tradition. Eugène Charrière, né et formé dans le commerce familial, va faire entrer les Forges d’Allevard dans la cour des grands. Sa grande capacité d’adaptation, sa curiosité naturelle et son esprit d’entreprise, vont faire merveille pour l’innovation et le développement de la métallurgie allevardine.
En 1857, Eugène Charrière apprend par Victorin Sabattier, natif de Goncelin, que le gouvernement français veut construire des navires de guerre blindés avec des plaques de fer.

courrier des forges

Eugène Charrière propose de se lancer dans l’aventure, aux frais de son entreprise, et cela, malgré la concurrence de l’entreprise Petin-Gaudet, du groupe CFAMCF (1) de Rive de Gier (Loire), forte de 9000 salariés, bien introduite dans les sphères gouvernementales.
 Les plaques fabriquées avec les fers d’Allevard sont unanimement reconnues pour être d’une qualité exceptionnelle.

au fort de Vincennes, les plaques de blindage ont été testées dans les conditions du réel.
au fort de Vincennes, les plaques de blindage ont été testées dans les conditions du réel.

En décembre 1857, deux plaques fabriquées à Allevard furent testées en même temps que celles fournies par Petin-Gaudet. Elles se révélèrent les plus résistantes. En conséquence de quoi, l’ingénieur Dupuy de Lôme, directeur des constructions navales, passa commande aux forges d’Allevard de la moitié des plaques de blindage nécessaire, soit 410 tonnes.
Le pari fou d’Eugène Charrière était gagné !
 A chaque livraison, des plaques témoins étaient présentées aux essais au Polygone du fort de Vincennes. Pour un quelconque défaut, le lot entier était refusé.




sur le chantier du Mourillon (l'Illustration du 3 décembre 1859)
sur le chantier du Mourillon (l'Illustration du 3 décembre 1859)




Lancée à Toulon le 24 novembre 1859, la frégate La Gloire fut admise au service actif en août 1860. Ernest Doudart de Lagrée* (1823-1868), natif de Saint Vincent de Mercuze, tout jeune lieutenant de vaisseau, participa aux essais en mer de la frégate.


JP Macian et C. Bachelier devant la maquette

 Par la suite, 8 bâtiments furent construits (4 frégates et 4 batteries) sans un seul lot refusé. Pour la 5ème Frégate il fut exigé des plaques plus grandes, surtout leur épaisseur passant de 14 à 15 cm. Malgré cette nouvelle difficulté, les techniques utilisées, laminage, corroyage et traitements thermiques donnèrent la ténacité nécessaire et indispensable à la bonne tenue de ces plaques lors des chocs des obus de l’artillerie.

 Des essais furent néanmoins réalisés et les plaques des Forges d’Allevard se révélèrent une fois de plus les meilleures. Mais les « hautes » relations de Petin-Gaudet jouèrent à fond en sa faveur, ce qui eu pour conséquence d‘écarter l’entreprise allevardine malgré la supériorité de sa fabrication. Cela s’est révélé tellement vrai que Petin-Gaudet proposa même à Charrière de racheter les plaques refusées par le ministère !...

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Après une livraison des nouvelles plaques le 30 mars 1864, E. Charrière informa le ministre qu’il avait décidé d’arrêter la fabrication des plaques de blindage, lassé des intrigues et vexations des ingénieurs du ministère à son endroit.
 Ainsi, une aventure industrielle novatrice prenait fin après six années d’un travail intense en recherches et améliorations mené par les personnels des Forges d’Allevard.

au fort de Vincennes, les plaques de blindage ont été testées dans les conditions du réel.

Les plaques de blindage devant le musée d’Allevard sont les ultimes témoins de la contribution essentielle des ouvriers et des maitres de forge d’Allevard à la grandeur maritime de la France.








(1) Compagnie des Forges et des Aciéries de la Marine et des Chemins de Fer
 Sources :
  • « Histoire de ma carrière industrielle... » Eugène Charrière, Grenoble 1878
  • Archives Départementales de l’Isère
  • Musée d’Allevard
crédits photo: D. Voisenon, JP Macian, musée d'Allevard, musée de la Marine à Paris.*

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